LE FILS - Michel Rostain

C'est Lion, mort à 21 ans d'une méningite foudroyante, qui nous raconte sa propre mort et la façon dont son père (qu'il continue donc d'observer) va vivre sa disparition et tenter de faire son deuil. Le thème de la perte d'un enfant est donc abordée ici de manière très originale dans la mesure où le narrateur n'est autre que le défunt et où l'endeuillé n'est non pas la mère mais (et c'est rare que l'on en parle), le père qui de bat entre sa douleur et sa culpabilité grandissante. Car en effet, celui-ci s'en veut de n'avoir pas compris les nombreux signaux envoyés par son enfant chéri et se met donc en tête de "Comprendre pourquoi". A travers ses pleurs, ses souvenirs, ses regrets, c'est l'histoire de l'amour et de la complicité entre un père et son fils qui est racontée ici. Les regards, les embrassades et les poignées de mains maladroites, la pudeur dans l'expression de l'amour de l'un pour l'autre...

Après avoir lu "Tom est mort" de Marie Darrieussecq, j'avais pourtant décidé de ne plus me plonger dans des livres traitant du sujet du deuil parental. Mais Le Fils (qui a d'ailleurs reçu le prix Goncourt du premier roman) aborde ce sujet sous un tout autre angle et malgré tout avec "humour". J'ai beaucoup aimé le fait que le narrateur soit le fils de 21 ans qui regarde son père et ne peut s'empêcher de "râler" en le voyant se démener et s'obstiner à comprendre pourquoi son fils adoré est parti. Le fait que l'on parle du père et non de la mère est quelque chose qui m'a touché également car on apprend aussi beaucoup sur les relations père-fils et surtout sur cet amour paternel qui se vit souvent beaucoup plus discrètement que l'amour maternel. Pour moi c'est un grand coup de coeur! 

Mon passage préféré : "Donc, dernier soir ensemble sans le savoir. Papa se cale contre moi, mal assis dans ce putain de lit qui grince. Il me caresse doucement la tête. Il me propose de dormir près de moi, comme il faisait quand j'étais petit. Je dis non. Il n'insiste pas. Il s'en voudras. S'il avait insisté, j'aurais peut être accepté. Ca n'aurait rien changé mais il aurait gardé le plaisir amer d'une autre et dernière nuit passée tout contre le corps chaud de son fils. Comme une devoir-bonheur accompli. Papa au contraire se rappelera toujours douleureusement de cette minute où, accablé sur lui-même de fatigue et de mal crâne, il s'était éloigné à un bon mètre du lit, râlant très fort en silence Mais bordel aide-moi donc un peu, mon fils, aide-moi à t'aider, excédé par mes appels muets et contradictoires.... Et puis, tête-à-queue, papa ne bougonne plus, il se lève en e regardant. Tendresse. Il s'assoit au bord du lit, il me caresse la main, la jambe. Non, pas d'agacement, il doit me prendre comme je suis, chacun souffre comme il peut, il n'y a pas à intrepréter mes symptomes. Papa tente d'être avec moi, rien que cela. Papa progresse. Ce n'est pas facile en famille."

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