CHANSON DOUCE - Leila Slimani

Après avoir mis sa vie professionnelle de côté afin de s'occuper de ses 2 enfants Adam et Mila, Myriam décide de suivre les conseils de son mari Paul et de reprendre son travail d'avocate au sein d'un cabinet. Se pose alors la question de la garde de leurs enfants qui reviendra, après quelques recherches, à Louise qui a tout de la nounou idéale. Seule et isolée, en grande difficulté financière, elle semble vouloir et pouvoir se donner entièrement à sa mission qu'elle prend très à cœur. Très vite, Louise se rend indispensable au sein du foyer dont elle s'occupe à présent entièrement ; garde des enfants, ménage, linge, bouquets, petites attentions pour ses "patrons" qui ne savent pas vraiment comment se positionner face à un tel dévouement. Dès lors, la gêne et la dépendance vont naître parallèlement de chaque côté pour laisser le drame creuser son sillon jour après jour...

J'ai lu "Chanson douce" d'une traite! Impossible de le lâcher. Les personnages et l'ambiance générale, l'atmosphère lourde, sont si bien décrits qu'on a l'impression de se trouver avec nos 5 personnages au cœur de cet appartement qui va devenir le théâtre de la pire des horreur. 

Il n'y a d'ailleurs aucun suspens à ce niveau là, la première scène nous explique d'emblée l'issue de ce récit dramatique, c'est la seule chose que je reprocherais à ce livre. Mais il me semble que le but de Leila Slimani était surtout l'analyse "sociale" et psychologique qu'elle réussit pour le coup avec talent! La mécanique du lien de dépendance malsaine, la question de l'éducation des enfants, de l'isolement... beaucoup de questions indirectement soulevées sur un fond de drame psychologique merveilleusement bien mené. Un coup de cœur! 

Mon passage préféré : En le déshabillant, elle a remarqué deux traces étranges, sur son bras et sur son dos, à hauteur de l'épaule. Deux cicatrices rouges et presque effacées mais sur lesquelles on devine encore ce qui ressemble à des marques de dents. Elle pose sur la blessure de doux baisers. Elle tient son fils collé contre elle. Elle lui demande pardon et le console après coup de ce chagrin survenu en son absence.
Le lendemain matin, Myriam en parle à Louise. La nounou vient à pine d'entrer dans l'appartement. Elle n'a même pas eu le temps d'enlever son manteau que déjà Myriam tend vers elle le petit bras nu d'Adam. Louise ne paraît pas étonnée.
Elle hoche les sourcils, accroche son manteau et elle demande : "Paul a emmené Mila à l'école?
- Oui, ils viennent de partir. Louise, vous avez vu? C'est une trace de morsure non?
- Oui, je sais. J'ai mis un peu de crème dessus pour la cicatrisation. C'est Mila qui l'a mordu.
- Vous en êtes sûre? Vous étiez là? Vous l'avez vue?
- Bien sûr que j'étais là. Ils jouaient tous les deux dans le salon pendant que je préparais à dîner. Et là, j'ai entendu Adam hurler. Il sanglotait, le pauvre, et au début, je n'ai pas compris pourquoi. Mila l'avait mordu à travers ses vêtements, c'est pour cela que je n'ai pas tout de suite su.
- Je ne comprends pas, répète Myriam, en embrassant le crâne glabre d'Adam. Je lui ai demandé plusieurs fois si c'était elle. Je lui ai même dit que je ne la punirais pas. Elle m'a juré qu'elle ne savait pas d'où venait la morsure".....